Nasreddine Hodja est un personnage très connu dans tout le monde oriental. Ses aventures sont connues dans des dizaines de langues : persan, grec, russe, arabe, turc, bulgare…
On le surnomme le « fou sage » car les histoires où il apparaît montrent un personnage oscillant entre la bêtise et la sagesse. Ces histoires défient la logique. Elles sont tantôt drôles, tantôt paradoxales et cependant elle ont souvent un sens plus profond, au-delà de l’absurdité apparente du sens premier.. On pourrait dire que les anecdotes racontées se rapprochent dans leur essence aux kôans zen, utilisées dans le bouddhisme. Ses histoires, souvent très courtes, sont plutôt drôles au premier abord, mais on pourrait y retrouver des sujets de réflexion et de méditation, ainsi qu’un sens beaucoup plus profond, voir mystique.
NASREDDIN, SON FILS ET L’ANE
Nasreddin Hodja et son fils partaient pour le marché, le père à pied, l’enfant sur l’âne.
Ils rencontrèrent un passant qui dit au fils :
— N’as-tu pas honte, toi sur l’âne et ton père à pied ?
Alors Nasreddin le fit descendre et enfourcha l’animal.
Ils tombèrent sur un autre passant qui s’exclama :
— On aura tout vu ! Le père grand et fort sur un âne et le pauvre gamin qui suit à pied !
Gêné, Nasreddin fit monter son fils avec lui.
Ils croisèrent une troisième personne :
— Quels sans-cœur ! Deux sur un pauvre bourricot !
Cette fois Nasreddin s’énerva :
– Mon fils, pour satisfaire les gens, il ne nous reste plus qu’à prendre l’âne sur nos épaules.
LE PARTAGE EQUITABLE
Quatre enfants viennent trouver Nasreddine et lui demandent : « Nous n’arrivons pas à partager des noix équitablement entre nous. Tu pourrais nous aider ?
— Voulez-vous le partage de Dieu ou celui des hommes ? Leur demande Nasreddine.
— Le partage de Dieu », répondent-ils sans hésiter.
Nasreddine ouvre alors le sac et donne deux poignées de noix à l’un des garçons, une poignée à un autre, deux noix au troisième et une seule noix au quatrième.
« Qu’est-ce que c’est que cette distribution ? s’écrient les enfants.
— C’est la manière divine. Il donne beaucoup à certains, peu à quelques-uns, rien à d’autres. Si vous aviez choisi la manière des hommes, j’aurais fait un partage équitable. »
DIEU FAIT BIEN LES CHOSES
Nasreddin Hodja, fatigué, décida de se reposer à l’ombre d’un noyer qui se trouvait au
milieu d’un champ de citrouilles.
Levant la tête, il constata que sur un arbre si grand, il y avait de tous petits fruits.
Regardant autour de lui, il vit que de toutes petites tiges portaient des citrouilles énormes. Il
trouva cela bien étrange et s’endormit. Il fut réveillé par une noix qui lui tomba sur la tête.
— Dieu fait bien les choses, se dit-il. Si les citrouilles avaient été sur l’arbre, ma pauvre tête !
LA DJELLABA
Un jour la femme de Nasreddine entend un grand bruit dans l’escalier. Elle demande à son mari :
« C’était quoi ce bruit ?
— Rien, c’est ma djellaba qui vient de tomber dans l’escalier !
— Une djellaba qui fait tant de bruit ? Comment ça se fait ?
— C’est que j’étais encore dedans… »